(Texte de Flora Diguet, actrice-danseuse dans « Anatomies 2008 / Brazzaville - Saint-Brieuc ».)

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Ils dansent. Ils connaissent leur corps mieux que personne et savent exactement ce que représente un geste. Corps d'exploits. Ils ont ce feu intérieur, cette intensité, qui les portent sur le plateau. Ils dansent mais ils ne savent pas nager. À Maty je découvre cela avec stupeur. Tous, ils ont peur du moindre courant, peur de perdre pied. Je pensais que leur corps n'avait peur de rien. En Afrique, quand tu vis en ville, tu n'apprends pas à nager. Soudain je découvre ces corps autrement, corps qui refusent, se recroquevillent, se protègent. Ce que mon corps ne sait pas l'effraie.

[« C'est un aveu un secret entre yo na ngaï. »]

Ce qui me surprend encore plus, ce sont leurs rires gênés ou excités quand ils sont dans l'eau. Se voir dans l'eau. Certains rampent, d'autres improvisent une nage intuitive. Au Carré perd sa force tranquille et tend une main désespérée vers Damien. Princia s'accroche à mon cou et crie quand nous n'avons plus pied. Ces moments de première fois, de peur dépassée, nous rapprochent. Les Français s'improvisent maîtres-nageurs, nous enseignons quelques mouvements de brasse, réinventant la perche à l'aide d'une longue branche de manguier.

De retour sur terre les forces s'égalisent. Comme Damien et moi face à la danse, ils nous ont offert leur tremblement face à la nage.