Dans le hall de l'hôtel, je regarde à la télévision quelques images des cérémonies organisées au Gabon autour de la dépouille mortelle d'Édith. Sassou et Bongo, Idriss Déby et quelques autres mâles chefs d'état s'enlacent, s'embrassent (comment toucher ?). Je demande : elle est morte de quoi Édith ? Au moment où je sors, un jeune homme me rattrape et me dit : « Édith a touché les fétiches du président Bongo, son mari, c'est de cela qu'elle est morte. »

Seconde représentation. Réactions du public plus vives, plus joyeuses. À la sortie un groupe d'une dizaine de jeunes gens s'approche de moi. Ce sont des slameurs. Ils reprennent les fragments de la pièce, ils les slament. Ils me demandent des textes, veulent savoir si je les autorise à les interpréter. Leurs noms de slameurs : Robinson Solo, Axel Web, Aurore Boréale, Michaël Juste, De Ronsard, Soleil d'Afrique, Étrange Gyscard… À la cafétéria, Magogo, Anicet de son prénom, grand danseur de rue, élégant comme un prince de la nuit (les Congolais sont les rois de la sape), un des acteurs-assistants qui ont fait partie de la représentation de ce soir, se lance dans un numéro de bègue qui fait rire tous ceux qui l'entourent. Vers minuit, il nous raconte qu'il a vendu à un spectateur le bâton lumineux qu'il a dans la bouche à la fin du spectacle.

Le journal Les dépêches de Brazzaville, le grand quotidien de la ville, fait sa première et sa dernière page sur Anatomies 2009. Le journaliste Quentin Loubou parle d'un spectacle « époustouflant et parfois sensuel ». Princia Biyela et Marie-Laure Crochant sont à la une. Belle photo d'une femme noire et d'une femme blanche qui se touchent.