Nous faisons le trajet en mini-bus.Tout le long de la route des bornes annoncent la distance qu’il reste à parcourir pour atteindre la frontière du Niger : KOULBILA NIGER 347 (kms).

Des étendues de terre rougeâtre, des herbes sèches couleur paille, des arbres maigres et toujours de mignonnes petites chèvres qui trottinent avec courage.

Tiens, un rassemblement de bicyclettes autour de quelques moutons. À Ouaga, partout des motocyclettes. Dans la brousse, on a juste de quoi se payer des bicyclettes ?

Je suis assis à côté du chauffeur. Je regarde ce paysage qui m’émeut toujours autant. (En 2004, le cas est tombé en panne, nous avons passé une demi-journée « dans la nature ».)

Kougri. Rochers noirs. Arbres sans feuilles. Arbres avec feuilles vertes. Groupes de paillotes rondes au toit pointu. Des paillotes couvertes de vieille paille noire, des paillotes couvertes de paille jaune. Villages. Les petits greniers sur pilotis. Maigre rivière. De petits troupeaux de vaches bossues. L’habituel camion en panne et les deux types qui déboulonnent les roues jumelles. Une chèvre debout contre le tronc d’un arbre. Une femme à côté d’un énorme sac. Un homme noir vêtu de noir qui marche lentement : sur sa tête trois sacs.

Un texto d’Annie. Elle évoque Lazare, l’homme qui dans Terres Promises traverse le désert.

Rapadam. Jeunes filles à bicyclette qui pédalent sur le bord de la route. Femmes en file indienne marchant sur la terre sèche. Des ravines.

Ouidi. Niger 312. Femmes bassines sur la tête et enfant dans le dos. Jeune fille immobile appuyée sur le guidon de son vélo nous regarde passer.

Mogtedo. Marché multicolore. Pyramides blanches. Toujours à la lisière des localités ces milliers de sacs en plastique accrochés aux épineux, aux arbres, aux touffes d’herbe. Dans le soleil. Désolation. La terre étouffe la gorge obstruée par des sacs en plastique.

Des lignes délimitent des parcelles. Frontières fines. Un dessin abstrait. Des rectangles.

Zorgondo. Niger 302. Des collines : d’anciennes carrières sur lesquelles ont repoussé des arbustes. Des camions peuplés de grappes de jeunes gars et de ballots.

Une femme violette comme un évêque, un grand pendentif doré au cou, pédale doucement. Une vache, une corde au cou, traverse la route.

Des rochers à fleur de terre. Belle couleur de la pierre.

Koupela. Frontière Togo 140kms. Niger 252. FADA N’GOURMA 78. Trois petits ânes traversent la forêt. Une femme assise au pied d’un arbre. Deux chèvres noires et blanches. Le temps africain est là. Je suis dedans.

BASKOURE. Le premier vautour. Un cochon noir. Un enfant en chemise bleue, un enfant en chemise rouge.

KABEIGA NIGER 227. Un flamboyant. Ses fleurs. Lumière. De grandes jattes pensues. De petits greniers surélevés et ventrus, pères Ubu perdus.

Terre sèche. Des ravines. Pas une goutte d’eau. Végétation à ras de terre. Des hommes creusent une tranchée profonde.

Nous passons, vitres ouvertes. De jeunes pâtres lèvent la main, nous sourient.

DIAPANGOU – NIGER 197. La tranchée m’intrigue. Très longue tranchée. Des têtes d’hommes. Des épaules. Mouvement des pioches. Des tas de bois bien alignés. Les pots d’échappement des camions expulse une fumée noire opaque. Dans le minibus le rire éclatant de Papythio.

FADA N’GOURMA – NIGER 172 (Ouagadougou 220). Dans la rivière un homme noir. Un peu d’eau. Très peu. Un homme noir seul dans un peu d’eau. Arrêt à Fada N’Gourma. Nous mangeons de la viande de mouton sur le bord de la route. L’homme debout devant son bidon-braséro emballe dans du papier kraft les morceaux de mouton grillé, ajoute du piment dans un coin du papier brun. Nous nous installons à une table sous une toile tendue sur des piquets de bois. Boisson : coca-cola. J’ai aussi acheté une bouteille de gingembre.

Autour de nous des enfants. Beaucoup d’enfants. Un adolescent avec un enfant dans le dos.

Un petit garçon de 7 ou 8 ans active son âne en rythme assis sur le coin avant gauche de sa carriole. Il transporte un gros bidon d’eau en métal. Porte un maillot vert tendre.

La pluie s’est faite rare cette année. Au Niger, des gens meurent de faim. Des régions entières sont menacées par la famine.

À partir de Fada N’Gourma, nous roulons en convoi.

Dans le minibus musique de Bob Marley. Toute la troupe chante. Nous roulons vers le Niger. Moussa, le chauffeur imperturbable.

PIEGA – NIGER 112kms. Au fond d’une ravine un filet d’eau. Une vache noire bien maigre et quelques chèvres éthiques y boivent.

Et voici le baobab. Impérial.

Une mosquée en construction.

L’air est de plus en plus chaud. Ce vent chaud ! Sensation. Mais la terre, elle, souffre. Et les humains. Terre sèche. Très sèche. Trop sèche.

Sur les têtes des chèches maintenant. Et des chapeaux de paille.

Niger, tu es tout près, je te sens.

KANCHARI – Zone frontière entre le Burkina Faso et le Niger. Entrée au Niger. Péage. De chaque côté de la route deux bidons rouillés – type bidons de pétrole – emplis de cailloux et de morceaux de bois. Tendue entre les deux bidons une ficelle ; tout au long de la ficelle pendent des chiffons.

Militaire avec béret rouge. Courtois. Me salue. Demande un papier au chauffeur. Ouvre la frontière.

Zone de vérification des passeports. Tentes. Petits commerces ambulants. Des dizaines de camions bâchés. Beaucoup de chauffeurs dorment sous les camions, à l’ombre. D’autres sont assis sur des caisses. Zone d’attente.

Des femmes préparent des beignets, les font frire sous le soleil. Le visage de l’une d’elles est enveloppé d’un voile bleu.

Je mange des beignets à Kantchari. La dernière fois que j’ai mangé des beignets à Kantchari c’était en 2004 avec Kouam Tawa, Ese Brume, Wakeu Fogaing, Martin Ambarra…

En route pour Niamey, capitale du Niger.