Couverture de la revue Les Cahiers de Prospero 5

(Article écrit par Roland Fichet, publié dans Prospero N°5, Traces, Juillet 1995, au sujet de « Pièces de Guerre » de Edward Bond, mis en scène par Alain Françon au Théâtre de l'Odéon, en janvier 1995.)


Le terrible poids des gestes décisifs. La mécanique (incompréhensible ?) de l'humain, de l'humain aux prises avec son besoin de survivre, aux prises avec son destin. Incompréhensible ? Pas sûr ! Acharné à sa perte ? L'homme patiemment œuvre à sa destruction. Fables et paraboles. La mécanique, l'engrenage des relations et des actes (Qu'en est-il de l'humain ?).
Des seaux d'eau froide jetés à la face des spectateurs (et des lecteurs).
L'homme sur un trône de paille et qui joue avec des allumettes, et les allume et souffle dessus et va finir c'est sûr par foutre le feu.
Plaisir d'un discours construit. Un poétique savante, un discours savant. L'écrivain et sa mission. Edward Bond sait qu'il dit quelque chose et prend au sérieux le fait de dire quelque chose. La forme est soulevée par le message et le message par la forme.
Retour sur les scènes françaises d'une constructions dramatique qui articule un discours, qui s'organise autour d'un discours central.
La pièce de théâtre conçue comme une machine à explorer des comportements et particulièrement des comportements paradoxaux.Intensité des situations. Le mouvement de la pièce nous emporte toujours plus loin.
Une pensée au travail dans les formes dramatiques. Dans l'invention d'une langue et de formes dramatiques qui assument cette pensée, qui la mettent en jeu.
A côté de spectacles fondés sur le fragment, la dérive, l'absence de toute fable, voir de tout personnage, Edward Bond avec les Pièce de Guerre nous repose la question de la mécanique dramatique.
En prenant le parti de nous engager dans un voyage en plusieurs étapes et plusieurs pièces - Rouge noir et ignorant, La Furie des nantis, Grande Paix - Alain Françon nous oblige à nous déplacer au coeur de cette vision terrible du monde. Implacablement.
Un plateau, quelques cloisons de bois, des acteurs, le texte de Bond : A prendre ou à laisser.
Femme : Valérie Dréville. Dense. Extrême. Aux bords de tout.