Dans le mot qu’elle m’adresse début juillet avec son deuxième roman, Contours du jour qui vient, Léonora Miano parle de « pages qui cherchent encore la lumière ». La première phrase du roman : « Il n’est que des ombres alentour, c’est à toi que je pense. » Cet été je lis le livre et j’entends, c’est vrai, une voix tendue vers la lumière, obstinément. Et qui la crée. J’écoute cette voix de petite fille, qui ne renonce jamais. La voix de Musango, et je marche avec elle. Vers la lumière ? Oui, vers la lumière, malgré tout. Musango, corps et âme blessés, lutte avec ce qui la fixe pour la détruire, lutte avec le regard impitoyable qui la cloue, qui la rend muette, lutte avec la mort en elle, lutte avec sa mère, œil obsédant. (Devant l’horreur ou simplement l’étrangeté, nous voulons détourner le regard, mais c’est en vain. page 212).

Sortir de la nuit. Sortir de l’intérieur de la nuit. Aller vers le jour qui vient. Est-ce que cette tension vers plus de conscience fragilise ce roman qui comme le précédent vous noue les tripes ? Est-ce que le projet de sens de l’auteur montre trop le bout de l’oreille ?

À France Inter, le 30 août, la voix de Léonora Miano. Belle voix. Contours du jour qui vient. Elle parle des églises ou plutôt des sectes qui envahissent l’Afrique Centrale, sujet qu’elle aborde de front dans son roman. Au Congo, cet été, ce phénomène m’a frappé. Beaucoup de jeunes lycéens et surtout de jeunes lycéennes auxquels nous nous adressions dans les ateliers de lecture et de théâtre étaient des adeptes de ces églises : les églises de l’éveil ! Les noms dont s’affublent les trafiquants de chair humaine – pasteurs auto-proclamés dans Contours du jour qui vient : Lumière, Don de Dieu, Vie Eternelle, Colonne du Temple. On frémit. J’écoute Léonora Miano, j’admire sa ferveur, son audace. Elle met le doigt où ça fait mal. C’est précieux. Pour quelques africains que je connais c’est inestimable.